Dites… Ne dites pas.
Depuis que je suis malade, j’ai entendu une belle série de conneries, je sais que en général on ne sait pas comment réagir face à ce genre de situation et que l’enfer est pavé de bonnes intentions, j’ai donc décidé, parce qu’il faut bien être constructive, de vous faire un very best off des « ne dites pas » et de proposer des « dites plutôt ».
1) Ne dites pas : Alors comment ça va ?
La réponse est mal. J’ai la trouille, je souffre, je dois encore passer des examens dont les résultats m’angoissent, si on me fait encore une prise de sang je vais hurler, je ne dors plus, je n’en peux plus, je veux que ça s’arrête, au secours…
Cette bête question nous forcera à vous donner ce qui est attendu mais contre-nature le très connu « ben écoute, ça va, on tient le coup… (connard) »
Dites plutôt : alors ma belle, comment va ton moral ? Là on sent qu’on s’intéresse vraiment à nous.
2) Ne dites pas :Mais voyons, c’est juste un examen de routine, tu ne dois pas t’inquiéter pour ça.
Exaspérant : Vous vous souvenez d’avoir paniqué pour un examen, un entretien d’embauche ou les résultats de votre prise de sang pour le cholestérol ? Bien. Cet examen de routine comme je l’entends souvent va indiquer : si le cancer a repris le dessus, si j’ai des métastases en un mot comme en cent, je vais savoir quelles sont mes chances d’avoir une vie normale les six prochains mois… alors le côté routine m’échappe un peu.
Dites plutôt : Ok, je t’accompagne pour les résultats et après on fait la fête, la première cuite de ta vie sera pour fêter ça… (et je comprends très bien aussi que si les résultats sont mauvais, tu seras là pour que je pleure dans tes bras)
3) Ne dites pas : Mais tu es guérie, Sophie.
Insupportable : parce qu’en plus d’avoir un diplôme d’informaticien, tu as fait médecine et tu as un doctorat en divination, tu as lu ça dans ta boule de Noël ?
Dites plutôt : Plus que quelques semaines et on aura la certitude que tout va bien. Si on allait au cinéma ?
4) Ne dites pas : Mais tu vas bien maintenant, tu n’es plus malade.
Voir point trois.
5) Ne dites pas : J’ai vu une Pub à la télé, un médecin annonce à sa patiente : « C’est un cancer Madame », elle répond « Ha ouf, ce n’est qu’un cancer, je suis soulagée docteur ». (pub dans le but de montrer les progrès de la médecine)
Le jour où la chimio sera dans TON bras, je te la ressortirai. En attendant, moi j’aurais une grippe et toi un cancer et là tu verras si tu seras soulagé.
Dites plutôt : dans ce cas là, vraiment ne dites rien.
6) Ne dites pas : ON a eu de la chance
On c’est qui déjà ? parce que si dans ON il y a moi, je ne suis pas d’accord, là pour l’instant, je n’ai pas du tout l’impression de faire partie des chanceux. Toi et moi, ON est pas dans la même équipe, alors va jouer ailleurs.
Dites plutôt : Si on allait au cinéma…
7) Ne dites pas : Oui, mais les pronostiques sont bons dans ton cas.
T’as raison en fait, c’était juste une grippe, les métastases, elles seront juste là pour me faire un coucou entre copines. A retenir, je suis un être humain, pas un numéro dans des statistiques. Même si il n’y a qu’une chance sur 100 que j’y reste, je trouve ça beaucoup trop.
Dites plutôt : elle est jolie ta nouvelle coiffure, elle te va bien.
8) Ne dites pas : elle est belle ta cicatrice.
Le jour où on me dira qu’on va se faire faire exactement la même rien que parce que ça me rend encore plus jolie, je le prendrai bien. En attendant, on s’abstient. Parce que non, je n’aime pas ce truc rougeaud en plein milieu de ma gorge et non je ne trouve pas ça beau mais je dois vivre avec alors, tu me fous la paix.
Dites plutôt : Bah ça va et puis avec les yeux que tu as, on ne voit que ça… Si on allait au cinéma.